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La livre turque prise dans une spirale infernale

La livre turque touche son plus bas historique. En cause : des inquiétudes sur les réserves de change du pays et un taux directeur fixé à un niveau excessivement bas par la Banque centrale.

Face à la pression grandissante sur sa monnaie, les autorités ont en effet préféré s'appuyer sur les banques d'Etat pour renforcer la lire avec des ventes en dollars, plutôt que d'augmenter les taux d'intérêt ou mettre un frein à l'offre de crédit.
Face à la pression grandissante sur sa monnaie, les autorités ont en effet préféré s'appuyer sur les banques d'Etat pour renforcer la lire avec des ventes en dollars, plutôt que d'augmenter les taux d'intérêt ou mettre un frein à l'offre de crédit. (Lefteris Pitarakis/AP/SIPA)

Par Gabriel Nédélec

Publié le 6 août 2020 à 18:34

La pression s'intensifie sur la livre turque. La devise est tombée ce jeudi à un plus bas jamais atteint, les interventions de la banque centrales ne parvenant plus à endiguer sa chute. Dans la matinée, elle s'est dépréciée de 3,2 % face au dollar, tombant à 7,2775 et dépassant son précédent record du 12 mai dernier, avant de remonter légèrement.

Cet affaiblissement de la monnaie turque s'explique en partie par des préoccupations autour des réserves de changes - que la Turquie ne cesse justement de brûler depuis un an pour maintenir sa monnaie à flot - et de la politique d'assouplissement monétaire agressive de la banque centrale qui a alimenté une fuite de capitaux étrangers.

Face à la pression grandissante sur sa monnaie, les autorités ont préféré s'appuyer sur les banques d'Etat pour renforcer la livre turque avec des ventes en dollars, plutôt que d'augmenter les taux d'intérêt ou mettre un frein à l'offre de crédit. En un an, le taux directeur de la banque centrale a baissé au total de 15,75 points de pourcentage, faisant tomber les taux d'emprunt de 24 % en juin 2019 à 8,25 %. Mais compte tenu du niveau de l'inflation (près de 12 %), les taux d'emprunts réels ressortent négatifs. De leur côté, les banques ont facilité l'accès au crédit dans l'ensemble de l'économie turque, soutenues dans cette entreprise par la banque centrale qui les a abreuvées de liquidité en leur rachetant des obligations d'Etats.

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Accès de fièvre à répétition

Mardi, cette politique - qui visait justement à éviter une dépréciation désordonnée de la monnaie turque - a provoqué un autre accès de fièvre. Le taux d'emprunt de la livre turque contre une autre devise étrangère - swap rate - a temporairement explosé pour atteindre plus de 1.000 %, contre 30 % la veille. Pour les analystes, cet événement témoigne de la fragilité grandissante du marché turc des devises.

Face à l'explosion de ce taux, plusieurs grandes banques internationales ne sont pas parvenues à rembourser leurs emprunts de livres turques, rapporte Bloomberg. C'est notamment le cas de Credit Suisse, qui a cependant remis les choses en ordre le lendemain, lorsque les taux se sont à nouveau stabilisés. Un événement similaire s'était déjà produit en mars dernier.

Pour endiguer la dépréciation de la monnaie, les autorités turques font face à un dilemme : « relever le taux d'intérêt de manière substantielle reviendrait à admettre que la stratégie de baisse des taux à un niveau bien plus bas que ne le justifiait les prévisions d'inflation et compenser les taux négatifs par des interventions coûteuses en réserve de change n'était pas la bonne », commente Piotr Matys, analyste chez Rabobank. Pour ce dernier, le gouvernement devrait donc d'abord utiliser d'autres leviers d'action comme imposer des limites strictes sur l'achat de dollars pour les citoyens turcs ou encore augmenter de manière significative les taxes sur ce type de transactions.

Gabriel Nedelec

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