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Grise, froide, triste… La Défense veut changer son image auprès des nouvelles générations

Le quartier d'affaires, qui a fêté ses 60 ans l'an dernier, se transforme pour s'adapter aux aspirations des salariés les plus jeunes.

A quelques jours du Brexit, La Défense se renouvelle pour attirer les plus jeunes salariés. 
A quelques jours du Brexit, La Défense se renouvelle pour attirer les plus jeunes salariés. (Shutterstock)
Publié le 23 mars 2019 à 12:00

Dans le hall du Belvédère, la musique résonne et les invités s'entassent sous la lumière des néons bleus. L'ambiance se veut jeune et branchée, et pour cause : ce jeudi soir, dans cet immeuble de La Défense, on inaugure Spaces, un espace de 18.000 m2 dédié au coworking. Entre la Grande Arche et les tours occupées par les sociétés cotées au CAC 40, Spaces se veut une invitation lancée aux start-up pour qu'elles aussi choisissent de s'installer à La Défense. Mobilier scandinave, salle de sport, table de ping-pong design… L'immeuble, autrefois occupé par le cabinet d'audit KMPG, a été entièrement revu pour le coworking. Et surtout pour séduire un certain public : les Millennials, ces jeunes nés avec le numérique et qui seront, pour certains, les entrepreneurs de demain.

Non seulement le cadre de vie dans l'entreprise est devenu primordial, mais aussi le cadre de vie autour de l'entreprise. 

Une nouvelle génération dont les aspirations bousculent le monde du travail. Et La Défense n'échappe pas au phénomène. « L'attente est très forte chez les Millennials, confirme la directrice générale de Paris La Défense, Marie-Célie Guillaume. Non seulement le cadre de vie dans l'entreprise est devenu primordial, mais aussi le cadre de vie autour de l'entreprise. » Ce n'est pas un hasard si, lors de l'inauguration de Spaces, le mot « bien-être » est cité une dizaine de fois dans les différents discours. Selon une étude publiée en juillet 2018 par le cabinet de recrutement Deloitte (lui-même basé à La Défense), les programmes de bien-être figurent parmi les motivations de 42 % des Millennials français au moment de choisir leur employeur.

Des ambitions à l'heure du Brexit

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D'où la question qui a, selon les termes même de sa directrice, « percuté » La Défense : à l'heure où l'économie se fait horizontale et le travail en réseau, l'idée d'un quartier d'affaires, symbole de la verticalité et du cloisonnement, a-t-il encore un sens ? Pour Marie-Célie Guillaume, c'est oui. Mais à une condition : « Il faut se transformer. » En proposant des locaux aux entreprises du quartier, mais aussi aux jeunes fondateurs de start-up, Spaces veut apporter de la flexibilité, et répondre ainsi à ces aspirations. Mais cela ne suffira pas.

Car le quartier d'affaires, qui a soufflé ses 60 bougies l'an passé, souffre d'une image négative, notamment auprès des plus jeunes. Un sparadrap dont les responsables locaux se débarrassaient volontiers, eux qui ne cachent pas leurs ambitions à l'approche du Brexit - qui pourrait amener des entreprises à quitter le Royaume-Uni. Comme un symbole, un site de recrutement s'adressant aux jeunes salariés a décidé de s'appeler « Fuyons La Défense ». Manque d'offres de restauration, transports bondés aux heures de pointe, impression de grisaille permanente… Les griefs ne manquent pas.

« Il y a encore cinq ans, c'était impossible de boire un bon café dans le quartier », se souvient Nicolas, 34 ans, ancien salarié de la Société Générale. « Et organiser un déjeuner à l'extérieur de la tour, même aujourd'hui, reste compliqué. » L'opération Foodtrucks lancée en 2016 a tenté de remédier au problème en faisant venir une dizaine de camions de restauration au pied des tours du printemps à l'automne. A la fin de l'année naîtra le projet Table Square, un lieu de 4.500 m2 dédié à la restauration, animé notamment par trois chefs étoilés. De quoi rendre le quartier d'affaires un peu plus désirable. L'aménagement de jardins potagers, cultivés par les salariés, ainsi qu'un parc de 7 hectares doivent également casser cette image froide et grise en impliquant ceux qui viennent y travailler tous les jours.

« L'avenir de La Défense, ce sont les sous-sols »

Une fois la journée de travail finie, La Défense se vide. « Le début de soirée est un vrai sujet », note Jean-Yves Durance, président de l'association des utilisateurs de La Défense (AUDE). « Les problèmes d'éclairages sont réglés, mais l'ambiance n'est pas vraiment là. » Les bars « afterwork » et la boîte de nuit souterraine L'Alternatif tentent d'y remédier. « L'avenir du quartier, j'en suis persuadée, ce sont les sous-sols », martèle Marie-Célie Guillaume. 45.000 m2 d'espaces sont vides et pourraient permettre d'aménager de nouveaux lieux de loisirs sous la dalle. « L'enjeu de La Défense, c'est de devenir un endroit où l'on vient le soir et le week-end », observe Jean-Yves Durance.

Encore faut-il pouvoir y circuler facilement dans la semaine. « La dalle est piétonne, c'est une bonne chose, mais on se perd très facilement entre les tours », déplore le président de l'AUDE, qui note que « la signalétique est mauvaise ». La question des accès et de la mobilité devient cruciale. « Une jeune femme m'a dit un jour qu'elle n'avait pas envie de travailler à La Défense parce qu'on ne pouvait pas y accéder en vélo : cela paraît anecdotique mais, en réalité, on prend cette question très au sérieux », explique Marie-Célie Guillaume.

Un temps interdite sur la dalle à cause d'un accident grave, la bicyclette est à nouveau autorisée. Une station de trottinettes Lime s'est également installée sur le parvis en octobre, le concurrent Wetrott' doit suivre cette année. Pour bénéficier de pistes cyclables, en revanche, il faudra encore attendre. La volonté politique se heurte à la réalité des infrastructures : « Le principe d'une construction sur dalle pose des difficultés », admet la patronne du quartier d'affaires. Le chantier de rénovation, affirme-t-elle, prendra « des années ».

Une tâche énorme, qui pourrait même intéresser le monde académique. L'AUDE, qui réunit une soixantaine d'entreprises et établissements universitaires du quartier, réfléchit ainsi avec l'université de Nanterre à la création d'une chaire dédiée. « L'idée serait d'utiliser les capacités de recherches académiques pour mieux comprendre les attentes des futurs salariés, avec un focus sur les Millennials, pour préparer les évolutions urbanistiques de La Défense », explique Jean-Yves Durance. « Le tout serait mis en parallèle avec les réflexions sur l'intelligence artificielle, les modes de travail et la structuration des bureaux. » De quoi trouver la formule magique pour séduire définitivement les nouvelles générations ?

Ariane Kujawski ( )

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