Japon : L’eau contaminée de Fukushima sera rejetée à la mer

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Après des années de débat et de tergiversations, le Japon va rejeter à la mer l’eau contaminée issue de la centrale nucléaire de Fukushima. Cette décision, annoncée par le premier ministre japonais Yoshihide Suga, a été qualifiée d’irresponsable par la Chine, et est déjà contestée par les pêcheurs locaux et les ONG.

Fukushima : 1 200 000 tonnes d’eau contaminée stockée près de la centrale

Cette eau qui provient de la pluie, des nappes souterraines ou des injections nécessaires pour refroidir les cœurs des réacteurs entrés en fusion après le tsunami de mars 2011 était au centre des polémiques depuis des années. L’eau contaminée est pompée en permanence, avec 170m3 supplémentaires chaque jour. Résultat, plus d’1 200 000 tonnes d’eau contaminée sont stockée dans des citernes près de la centrale, mais ces réservoirs devraient être pleins d’ici l’été 2022.

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C’est donc cette eau qui va être rejetée après traitement pour éliminer les principales substances radioactives. Ne restera que le tritium, impossible à éliminer, mais à des niveaux jugés acceptables. Selon Christophe Gariel, directeur général adjoint en charge de l’environnement à l’institut de radioprotection et de sureté nucléaire, les niveaux de tritium seront faibles, sans danger pour la santé ou l’environnement marin : « on va se retrouver dans des conditions qui sont très proches de ce qu’il se passait avant l’accident, lorsqu’un réacteur nucléaire fonctionne, il doit être refroidi et il émet des rejets d’eau très légèrement radioactifs ».

 

Bruno Chareyron : « Fukushima a déjà conduit à un des rejets les plus importants de radioactivité en milieu marin (…) ce n’est pas normal d’en rajouter »

L’agence internationale de l’énergie atomique estime également que cette option est en adéquation avec les pratiques bien établies du monde entier. D’autant que l’eau va se diluer progressivement dans l’océan Pacifique. Mais est-ce que cela suffira ? Pour Bruno Chareyron, directeur du laboratoire de la CRIIRAD, cette décision n’est pas acceptable : « la catastrophe de Fukushima a déjà conduit à un des rejets les plus importants de radioactivité en milieu marin. Aujourd’hui, au moment où l’on parle, il y a toujours des rejets incontrôlés par le ruissellement à travers les rivières ou le relargage de ce qui a été piégé dans le sable des plages, donc ce n’est pas normal d’en rajouter encore ».

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Le déversement commencera dans deux ans, le temps de procéder à un nouveau traitement de l’eau. Jusqu’ici, 80% de l’eau reste chargée de 62 nucléides malgré un premier traitement, et c’est là tout le problème selon Bruno Chareyron : « l’eau contient tout un cocktail d’autres éléments radioactifs, parmi lesquels l’iode 129 qui a une période de 16 millions d’années ». Les autorités japonaises assurent que les rejets seront bien inférieurs aux normes de sécurité, mais ces promesses ne suffisent pas aux pêcheurs locaux qui estiment que cette décision est désastreuse pour la réputation de leurs produits et qu’elle vient anéantir tous leurs efforts pour regagner la confiance des consommateurs.

Baptiste Gaborit

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