Publicité

Entre 25 et 35 ans, le "pire moment" pour avoir un enfant ?

Les femmes qui ont leur premier enfant avant 25 ans ou après 35 ans parviennent plus facilement à résorber l’écart de salaires avec leur mari, révèle une nouvelle étude américaine.

11604_1523372214_graph-parental-earning-gap.jpg

Par Julia Lemarchand

Publié le 10 avr. 2018 à 17:29Mis à jour le 10 avr. 2018 à 17:47

En France, les femmes ont leur premier enfant à 28,5 ans en moyenne. Et si c’était le pire moment - d’un point de vue strictement financier, s’entend ! - pour devenir mère ?

Si les écarts salariaux entre les femmes et les hommes ont été fortement réduits au cours des quarante dernières années, les inégalités restent tenaces. En France, à poste égal, l'écart inexpliqué entre la rémunération d'un homme et d'une femme est de 9%, rappelait encore Muriel Penicaud, ministre du Travail lors de la présentation de son plan pour lutter contre les inégalités hommes-femmes le mois dernier.

Sans surprise, la maternité a beaucoup à voir avec ce “gap” salarial persistant. Une nouvelle étude, réalisée par le Centre des études économiques du Bureau du recensement des États-Unis, confirme ce que beaucoup d’autres avaient déjà montré : tout de suite après la naissance du premier enfant, l’écart salarial entre les époux double, passant tous profils confondus de 12.600 à 25.100 dollars par an.

Publicité

Une évolution qui s’explique quasi exclusivement par une baisse de la rémunération des femmes, tandis que les salaires des hommes continuent, eux, de progresser. Et cet écart se creuse à l’arrivée de chaque nouvel enfant.

Un rattrapage salarial impossible, à deux exceptions près

Rien de nouveau, donc. Si ce n’est que cette récente étude parue en novembre 2017, et dont le New York Times s’est fait l’écho hier, identifie que pour la plupart des femmes, qui ont leur premier enfant entre 25 et 35 ans, l’écart salarial avec leur mari va avoir tendance à se réduire seulement aux 10 ans de l’enfant, mais le rattrapage ne se fera jamais totalement. Même quand les deux parents travaillent à temps complet.

Et ceci est particulièrement vrai pour les femmes les plus éduquées qui payent un plus lourd tribut que les femmes avec un faible niveau de revenus. Pire, le plus gros écart salarial post-grossesse s’enregistre paradoxalement chez les femmes qui gagnaient mieux leur vie que leur mari avant la naissance de leur enfant.

Un phénomène auquel échappent cependant les femmes qui ont leur premier enfant avant 25 ans ou après 35 ans, comme le montre le graphe ci-dessous. “Ceci suggère que pour les femmes, qui ont des enfants à la fin de la vingtaine et au début de la trentaine, la carrière est plus pénalisée que pour celles dont la maternité intervient alors que la carrière a à peine débuté ou est à l’inverse déjà bien établie”, résument les chercheurs.

Ces deux cas de figure (plutôt de l’ordre de l’exception) recoupent potentiellement des réalités sociales assez différentes, nuancent les chercheurs. Les femmes mères après 35 ans sont plus souvent des professionnelles diplômées et bien rémunérées, et elles n’auront aussi souvent qu’un seul enfant, tandis que les femmes mères avant 25 ans appartiennent généralement à une population de travailleurs peu qualifiés et peu rémunérés, où l’écart salarial femme-homme est de toute façon plus réduit que dans les autres groupes sociaux.

Un enfant, c'est du temps (et de l'argent)

Ces phénomènes sociaux ne sauraient expliquer, à eux seuls, la résorption de l’écart salarial entre ces femmes et leur mari, d’après les chercheurs. Le fait de construire une famille précisément en dehors de la période critique de la construction de la carrière, quel que soit le métier, est une hypothèse crédible à creuser dans de prochaines études, selon eux.

On en revient toujours au même constat : un enfant, c’est du temps. Or le temps n’est pas extensible. C’est même tout l’inverse qui se passe en cette période critique des 25-35 ans, pendant laquelle le travail requiert précisément beaucoup d’investissement (il faut faire ses preuves, réseauter, décrocher des promotions…).

Publicité

En outre, le temps consacré à l’enfant est encore largement une affaire de femmes. Le décrochage salarial des femmes est donc potentiellement lié au temps que les femmes prennent pour les enfants (temps partiel, congé parental, choix d’un emploi moins prenant…) au détriment de leur carrière et de leur salaire.

Les pistes pour mettre fin à ce schéma sont relativement bien connues : plus de flexibilité au travail, lutte contre le présentéisme en entreprise, implication des pères… Des sujets finalement très culturels, sur lesquels la France avance à petits pas.

Julia Lemarchand

Publicité