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Sondages de l'Elysée : Claude Guéant condamné à un an de prison dont huit mois ferme

Dans une décision particulièrement sévère, l'ancien secrétaire de l'Elysée a été reconnu coupable ce vendredi des délits de favoritisme et de détournement de fonds publics dans l'affaire des enquêtes d'opinion attribuées sans appel d'offres sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a fait appel.

Claude Guéant Tribunal de Paris, TGI, le 2 novembre 2021.
Claude Guéant Tribunal de Paris, TGI, le 2 novembre 2021. (JEANNE ACCORSINI/SIPA)

Par Valérie de Senneville

Publié le 21 janv. 2022 à 15:26Mis à jour le 21 janv. 2022 à 18:39

Du droit et de la morale. « L'anomalie » du fonctionnement de l'Elysée sous le mandat de Nicolas Sarkozy, « n'est plus acceptée par le corps social ». Ce vendredi, dans un jugement sévère, Claude Guéant, l'ancien secrétaire général de l'Elysée a été condamné pour délits de favoritisme et détournement de fonds publics à un an de prison dont 8 mois ferme, avec un mandat de dépôt différé. L'ancien secrétaire général de la présidence sous Nicolas Sarkozy, qui a, selon le tribunal, « démontré sa capacité à méconnaître l'autorité des décisions de justice », est actuellement emprisonné du fait d'une précédente condamnation.

Quant à l'ancienne directrice de cabinet du chef de l'Etat, Emmanuelle Mignon, même si elle « a été la seule à démontrer l'existence d'une conscience mais, malheureusement tardive, d'un devoir de légalité », le tribunal l'a condamnée à six mois avec sursis. Une condamnation plus dure que les réquisitions qui avaient souligné la « volonté réformatrice » de l'énarque. « Emmanuelle Mignon est la première à avoir réformé la Présidence de la République » se sont emportés ses avocats en annonçant leur intention de faire appel.

Lien de confiance rompu

« Les prévenus ont non seulement violé l'ordre public économique en enfreignant les principes directeurs de la commande publique mais également rompu le lien de confiance que chaque membre de la communauté nationale est légitimement en droit de tisser avec ses dirigeants publics élus ou nommés. La répression de comportement de cette nature, symptomatique d'une perte de repères cardinaux et d'un privilège accordé à des intérêts économiques privés » a martelé le président Benjamin Blanchet en lisant sa décision.

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Patrick Buisson, alors proche conseiller du chef de l'Etat, a été condamné à deux ans de prison avec sursis ainsi que 150.000 euros d'amende dont « la supposée rémunération n'a reposé sur aucun fondement contractuel, ni ne correspondant à aucune mission » a insisté le tribunal.

7,5 millions de dépenses

Entre 2007 et 2012 quelque 7,5 millions d'euros de dépenses de conseils et sondages en tous genres ont été engagés par l'Elysée en l'absence de publicité et d'appel d'offres comme l'exige le Code des marchés publics. En cause, notamment, des contrats de communication signés avec les sociétés de Patrick Buisson, rémunéré 10.000 euros par mois pour une mission de conseil et des sondages livrés à sa libre appréciation.

L'accusation en a compté 235, achetés puis revendus avec des marges de 65 à 71 %, pour un bénéfice de 1,4 million d'euros. Des dépenses qui dans un moment où la France subissait de graves déficits publics en raison de la crise financière, ont « jeté le discrédit sur la présidence de la République française », a encore insisté le président.

L'ex-sondeur Pierre Giacometti également poursuivi a été condamné à 6 mois avec sursis et 70.000 euros d'amende. Tous font appel. En revanche, l'ancien chargé de l'opinion à l'Elysée, Julien Vaulpré, a été relaxé.

Nicolas Sarkozy lui-même n'a pas été poursuivi car il a bénéficié de l'immunité pénale présidentielle. Le tribunal lui avait néanmoins imposé de comparaître en tant que témoin pendant le procès qui s'est tenu en octobre et novembre, mais il avait refusé de répondre aux questions des juges en invoquant le principe de séparation des pouvoirs.

Grandes dates de l'affaire des sondages de l'Elysée

2009 : la Cour des comptes donne l'alerte, épinglant dans un rapport des sondages signés en 2007, dans l'irrespect des règles de la concurrence.

2010 : l'association de lutte anti-corruption Anticor porte plainte contre X pour favoritisme.

Novembre 2011 : la cour d'appel de Paris bloque l'instruction, estimant que le juge risquerait de remonter jusqu'au chef de l'Etat, qui ne peut faire l'objet d'une enquête durant son mandat. Anticor se pourvoit en cassation. L'année d'après, la plus haute juridiction donne son feu vert à l'instruction de l'affaire.

Janvier 2013 : le parquet étend la saisine du juge d'instruction à tous les marchés conclus entre l'Elysée et neuf instituts de sondage entre 2007 et 2012.

2015 : en juillet, Patrick Buisson est mis en examen, notamment pour détournement de fonds publics. Deux mois plus tard, au tour de Pierre Giacometti d'être mis en examen pour recel de favoritisme.

2016 : Claude Guéant et Emmanuelle Mignon mis en examen pour favoritisme ou complicité de ce délit. L'année d'après, en mai 2017, ils sont de nouveau mis en examen, cette fois pour détournement de fonds publics par négligence.

Mai 2017 : fin de l'instruction. L'enquête montre que 235 sondages ont été achetés par l'Elysée au cabinet de Patrick Buisson entre 2007 et 2009, pour 1,4 million d'euros.

Août 2019 : Six personnes, dont Claude Guéant sont renvoyées en correctionnelle, ainsi que quatre sociétés.

Novembre 2021 : Sarkozy entendu comme témoin. Il refuse de répondre aux questions, invoquant son immunité présidentielle.

Janvier 2021 : Prison ferme pour Claude Guéant ; sursis pour M. Buisson, Giacometti et Mme. Mignon.

Valérie de Senneville

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