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Taxe Gafa : le gouvernement se lance malgré les critiques

Le projet de loi visant à instaurer une taxe de 3 % sur le chiffre d'affaires des plates-formes Internet est présenté ce matin en conseil des ministres. Pour le lobby du secteur, la quasi-intégralité de la taxe sera répercutée sur les clients des géants du Web qui, eux, ne paieront in fine que très peu.

Google, Apple, Facebook et Amazon paient peu d'impôt sur les sociétés en France et, avec cette taxe sur le chiffre d'affaires, le gouvernement espère toucher 500 millions d'euros par an à partir de 2020.
Google, Apple, Facebook et Amazon paient peu d'impôt sur les sociétés en France et, avec cette taxe sur le chiffre d'affaires, le gouvernement espère toucher 500 millions d'euros par an à partir de 2020. (Pascal SITTLER/REA)

Par Guillaume de Calignon

Publié le 6 mars 2019 à 08:25

Le projet de loi est présenté ce mercredi en Conseil des ministres mais il fait débat depuis déjà quelques semaines. Et, après s'être agité en coulisses, le lobby de l'Internet a décidé de passer la vitesse supérieure pour attaquer la taxe sur les Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon), ces géants du Web qui paient très peu d'impôts dans l'Hexagone, que le gouvernement veut instaurer.

Le taux de cette taxe s'élèvera à 3 % du chiffre d'affaires digital réalisé en France pour les entreprises dont les ventes mondiales sur le numérique sont supérieures à 750 millions d'euros ou supérieures à 25 millions dans le seul Hexagone. Le chiffre d'affaires concerné est celui issu de la publicité en ligne, de l'utilisation des données personnelles et des ventes réalisées sur les places de marché (mise en relation). Le schéma retenu est très proche du dispositif envisagé au niveau européen par la Commission et poussé par la France, mais encore battu en brèche par quelques Etat-membres.

Les consommateurs paieront

Mais qui paiera cette taxe à la fin ? Pour le cabinet d'avocats Taj, une filiale de Deloitte, mandaté par l'Association de l'industrie numérique et informatique (CCIA), il est très probable que la quasi-intégralité de la taxe, qui devrait rapporter 500 millions d'euros à l'Etat à partir de 2020, soit répercutée sur les clients des entreprises touchées. Un peu plus de la moitié du montant de la taxe devrait être payé par les consommateurs de services Internet, 40 % par les PME françaises qui utilisent les places de marchés, visées par cette taxe, et seulement 5 % devrait finalement être acquittée par les groupes concernés au premier chef selon Taj.

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Bref, « si l'objectif de la loi est de trouver un moyen d'imposer les géants du net sur les profits qu'ils réalisent, il faut se poser la question de l'adéquation de l'instrument utilisé puisqu'en l'état ce sont les consommateurs et les entreprises françaises qui risquent de supporter l'essentiel du poids économique de la taxe », résume Julien Pellefigue, associé de TAJ.

Une collecte difficile

L'autre problème que pourrait rencontrer le gouvernement, c'est celui de la collecte de cette taxe. « La complexité à établir la base fiscale est maximale », prévient Julien Pellefigue. « L'information sera très difficile à obtenir », assure-t-il. Par exemple, la vente de publicités ciblées sur Internet se fait par enchères automatisées et peu d'entreprises stockent aujourd'hui toutes les données notamment sur le prix de chaque transaction.

« Il y a des millions de transactions chaque jour », fait valoir Julien Pellefigue. Sans compter qu'il faudra vérifier les adresses IP de la personne visée par les publicités en question. La collecte de la taxe exigera des développements informatiques et donc des coûts supplémentaires. En résumé, « personne ne sait vraiment comment Bercy va faire pour contrôler les rentrées fiscales associées à cette taxe », selon l'associé du cabinet d'avocat.

« Emmanuel Macron a l'habitude de dire que la France doit devenir une 'start-up nation' mais l'Hexagone ressemble de plus en plus à la 'tax nation', dénonce Giuseppe de Martino, président de Loopsider et de l'Association des Services Internet communautaires (ASIC). Il considère qu'il s'agit d'un « très mauvais signal pour la France », notamment pour les start-up tricolores, le seuil de chiffre d'affaires de la taxe les incitant probablement, selon lui, à ne pas croître trop vite.

C'est oublier un peu vite qu'en 2017, Google a déclaré un chiffre d'affaires de 395 millions d'euros en France et a payé seulement 14 millions d'euros d'impôt sur les sociétés. Pourtant, le groupe californien réaliserait des ventes publicitaires de l'ordre de 2 milliards d'euros par an dans l'Hexagone - mais des transactions sont enregistrées en Irlande. Comme sa marge opérationnelle au niveau mondiale atteint près de 25 % des ventes, le géant aurait dû logiquement payer plus d'une centaine de millions d'euros d'impôts.

Reste à savoir si la taxe Gafa « à la française » est la bonne solution pour faire participer les multinationales de l'Internet au financement de l'Etat-providence et aux infrastructures qu'elles utilisent dans le pays où elles font des affaires. Bercy assure que la taxe a vocation à n'être que temporaire, le temps de trouver des accords en la matière au niveau de l'OCDE et de l'Union européenne.

Guillaume de Calignon   

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