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Avec l'état d'urgence, Donald Trump se prépare à un nouveau long combat

Le président américain tente de court-circuiter le Congrès pour financer son mur. Mais ce ne sera pas si simple.

Le président américain est conscient que ce n'est toutefois pas la fin du feuilleton.
Le président américain est conscient que ce n'est toutefois pas la fin du feuilleton. (Jim WATSON/AFP)

Par Nicolas Rauline

Publié le 18 févr. 2019 à 08:31

A peine la menace d'un nouveau « shutdown » éloignée, une autre polémique agite la classe politique américaine. Tout en signant l'accord parlementaire qui finance le budget fédéral et évite une paralysie administrative, Donald Trump a proclamé, ce vendredi, l'état d'urgence à la frontière avec le Mexique. Ce qui lui permet de financer la construction du mur sans passer par le Congrès.

« Nous sommes confrontés à une invasion, de drogues, de trafiquants, de gangs », s'est justifié le président américain, qui va mobiliser un total de 6,7 milliards de dollars, issus d'autres programmes fédéraux déjà votés. 

Dans le détail, il devrait rediriger vers la construction du mur 3,6 milliards de dollars de constructions militaires, 2,5 milliards de dollars issus d'un programme du ministère de la Défense de lutte contre les drogues, et 600 millions de dollars d'un fonds du Trésor. Des sommes qui s'ajoutent au 1,38 milliard voté dans le cadre de l'accord parlementaire pour des mesures de sécurité incluant notamment 55 miles (environ 88 kilomètres) de barrières.

Un « coup violent »

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Le président américain est conscient que ce n'est toutefois pas la fin du feuilleton. « Nous allons être attaqués. Peut-être qu'un tribunal donnera un mauvais jugement. Mais nous contre-attaquerons et nous irons si besoin devant la Cour Suprême. Et nous gagnerons devant la Cour Suprême, comme nous l'avons fait sur le décret bannissant l'entrée des ressortissants de certains pays », a-t-il ajouté.

L'issue est toutefois plus incertaine et, surtout, le combat s'annonce long. Les démocrates, qui dénoncent un « coup violent » contre la Constitution, vont d'abord déposer au Congrès une résolution visant à annuler l'état d'urgence. 

Celle-ci a de fortes chances de passer à la Chambre des Représentants, où ils ont la majorité, et même au Sénat, où certains républicains pourraient se joindre à eux, au nom de la défense du pouvoir législatif. Mais Donald Trump aura alors la possibilité d'opposer un veto… sur lequel le Congrès devra se prononcer. A la majorité des deux tiers, cette fois, ce qui réduit fortement les chances.

Rien avant 2020 ?

En parallèle, des actions judiciaires devraient être lancées. Avant même que Donald Trump n'officialise sa décision, la procureure de l'Etat de New York avait annoncé sa volonté de s'opposer à l'état d'urgence. Le gouverneur de Californie a fait de même. 

« L'action judiciaire a plus de chances d'aboutir, affirme Mark Tushnet, professeur de droit à la Harvard Law School. Le juge peut décider de bloquer la construction du mur, le temps du jugement. Et cela peut prendre des mois, voire des années. » Le mur pourrait donc, dans tous les cas, ne pas être érigé avant l'élection présidentielle de 2020…

Cette action judiciaire peut-elle déboucher, in fine, sur un camouflet pour Donald Trump ? Pour Mark Tushnet, c'est tout à fait envisageable. « Sur la définition de l'urgence, ce sera très difficile. A la différence de la loi française, la loi américaine n'encadre pas l'état d'urgence. Le président peut le définir comme bon lui semble. En revanche, il peut être débouté sur le fait que la construction du mur relève de l'armée. »

De nombreux précédents

L'état d'urgence est une procédure régulièrement utilisée aux Etats-Unis (59 fois, dont 32 sont encore en vigueur, sous la loi de 1976 qui donne au président le pouvoir d'outrepasser le Congrès). En général, il s'agit d'aller vite pour débloquer des fonds dans des régions touchées par des catastrophes ou de régler un conflit international. Des situations plutôt consensuelles qui expliquent que jamais ces passe-droits présidentiels n'aient été bloqués. Une seule tentative a eu lieu : en 2005, après l'ouragan Katrina, le président Bush souhaitait autoriser l'embauche de personnel en-dessous du salaire minimum pour venir en aide aux victimes. Un député démocrate a tenté de mettre fin à cette situation d'urgence, en vain.

Nicolas Rauline (Bureau de New York)

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