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Le Sénat veut faire de l'Arcep le gendarme des smartphones

Une proposition de loi, présentée par la Commission des affaires économiques, souhaite renforcer le régulateur des télécoms en lui confiant le contrôle des systèmes d'exploitation et des boutiques d'application sur les téléphones.

Le Sénat est à l'origine d'une proposition de loi visant à étendre la régulation de l'Arcep, le gendarme des télécoms, aux smartphones.
Le Sénat est à l'origine d'une proposition de loi visant à étendre la régulation de l'Arcep, le gendarme des télécoms, aux smartphones. (ANDBZ/ABACA)

Par Raphaël Balenieri

Publié le 22 oct. 2019 à 17:59Mis à jour le 22 oct. 2019 à 19:05

Régulateur des « tuyaux » des opérateurs télécoms, l'Arcep va-t-elle bientôt contrôler aussi les smartphones, les « robinets » du Web ? L'autorité présidée par Sébastien Soriano, qui plaide depuis des années pour une extension de son rôle aux terminaux mobiles, vient en tout cas de trouver un allié de poids dans son combat. Une proposition de loi du Sénat, présentée ce mardi à la presse, prévoit justement de lui confier de nouveaux pouvoirs en ce sens, dont la possibilité de prononcer des amendes contre les Gafam allant jusqu'à 4 % de leur chiffre d'affaires.

En quatre chapitres et neuf articles, la chambre haute du Parlement souhaite avec cette loi « garantir le libre choix du consommateur dans le cyberespace » (son titre officiel) en décloisonnant les écosystèmes fermés du Web. « Aujourd'hui, c'est comme si on était dans un centre commercial avec Google au rez-de-chaussée et Apple au premier étage », dénonce Sophie Primas, sénatrice (LR) des Yvelines et présidente de la Commission des affaires économiques, à l'origine du texte.

Régulation ex-ante

Concrètement, l'Arcep régulerait et sanctionnerait les pratiques contraires au nouveau principe de « liberté de choix sur les terminaux » instauré par l'article 1. Par exemple, l'impossibilité de désinstaller des applis présentes par défaut sur les smartphones, de changer de navigateur ou de magasin d'application. Le texte vise de fait Apple et Google. Les deux géants américains exercent un duopole tant sur les systèmes d'exploitation (Android ou iOS) que les magasins d'applications (Google Play Store ou App Store), même si le marché s'ouvre quelque peu, avec la montée en puissance de Huawei sur ces deux segments.

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L'Arcep serait chargé d'élaborer une régulation ex-ante (chapitre 1). Le régulateur des télécoms pourrait évaluer les pratiques d'Apple et de Google, de la même façon qu'aujourd'hui il note la qualité du service mobile des opérateurs télécoms. L'Arcep pourrait aussi régler les différends éventuels et, surtout, prononcer des sanctions. « C'est le bâton pour réprimer, mais l'idée, c'est de forcer le dialogue entre l'Arcep et les plates-formes », tempère toutefois Sophie Primas.

Acquisitions « prédatrices »

Le Sénat veut aussi instaurer le principe d'interopérabilité (chapitre 2) avec l'Arcep chargée de son contrôle. Les utilisateurs d'un réseau social comme Facebook ou Twitter pourraient alors dialoguer avec les membres d'un service rival, de la même façon qu'aujourd'hui un abonné SFR peut appeler un client Orange. Le RGPD a certes consacré le droit à la portabilité (pouvoir migrer ses données d'un service à un autre), mais les sénateurs veulent aller plus loin, avec là aussi la possibilité d'une amende.

Enfin, le texte veut lutter contre les acquisitions « prédatrices » (chapitre 3). Avant de racheter une start-up, les géants du Web seraient tenus d'informer l'Autorité de la concurrence, qui pourrait alors émettre un avis contraignant. Le Sénat souhaite contrôler les acquisitions plus modestes, en deçà du seuil déclenchant une déclaration obligatoire et qui échappent de ce fait à l'examen du gendarme de la concurrence.

Une approche « plus modeste et concrète »

Au moment où l'idée d'un démantèlement complet des Gafam fait son chemin aux Etats-Unis dans la perspective des élections présidentielles de 2020, cette initiative franco-française peut paraître isolée et complexe à mettre en oeuvre. Le Sénat revendique toutefois une approche « plus modeste, mais plus concrète »« Démanteler les Gafam, c'est juridiquement très complexe, il y aura des recours sans fin, estime Sophie Primas. Là, au contraire, on met un régulateur là où il n'y en a pas. »

Reste à voir désormais quels moyens supplémentaires seraient donnés à l'Arcep, déjà très mobilisée sur la 5G. « Nous nous préparons pour ce rôle depuis un an et demi, on est prêt pour passer à l'action », assure Sébastien Soriano, le président du régulateur. Dans tous les cas, la proposition de loi est la première pierre. Le Sénat compte sur la « bienveillance » du gouvernement qui doit la reprendre pour qu'elle puisse prospérer à l'Assemblée nationale. Le cas échéant, certaines mesures pourraient être reprises sous forme d'amendements dans la loi réformant l'audiovisuel, attendue en Conseil des ministres fin novembre.

Raphaël Balenieri

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