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« Nous allons nous ouvrir à de nouveaux marchés »

Fort d’un bon premier trimestre, le dirigeant se montre confiant, malgré l’inflation, s’appuyant sur une marque forte, sur l’innovation et sur les acquisitions. 

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Gonzalve Bich, directeur général et administrateur de Bic (Bic)
Publié le 1 juil. 2022 à 17:35
Gonzalve Bich, Directeur général et administrateur

Alors que l’on redoute aujourd’hui l’approche d’une récession mondiale, comment percevez-vous l’évolution de Bic au cours des prochains mois ?

Je vois de la croissance pour Bic. En 2021, nous avons enregistré une hausse du chiffre d’affaires de 12,5%, et même de 15,9% à taux de change constants. Bic est une marque forte, dont l’innovation est basée sur de vrais besoins. Nous avons lancé de nouveaux produits qui ont surperformé. A titre d’exemple, notre briquet Bic EZ Reach [usages utilitaires hors tabac, en format poche] aux Etats-Unis a déjà conquis une part de marché de plus de 5%, et nos équipes prévoient d’atteindre 10% en 2023. Bien sûr, il y a des vents contraires. La situation sanitaire n’est pas complètement stabilisée au niveau mondial. Il y a aussi le sujet des matières premières qui pourrait engendrer des hausses de coûts dans certains segments. Et nous devons tenir compte de l’inflation au niveau des consommateurs, des carburants, de l’énergie… Nous devons gérer tout cela en restant fidèles à notre réputation de bon rapport qualité/prix et en poursuivant la croissance.

Constatez-vous un ralentissement de la consommation ?

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C’est le cas dans certains pays, mais ce ne sont pas les plus gros marchés de Bic. Nous devons être agiles et continuer à gagner des parts de marché, nous repositionner quand il le faut. Certains segments continuent de croître partout dans le monde, comme le coloriage, les rasoirs de haute performance ou encore les briquets à valeur ajoutée. Au premier trimestre, nous avons progressé dans tous nos métiers et dans toutes nos géographies. Les Etats-Unis, en particulier, ont été tirés par la performance des briquets. Nous avons, en outre, lancé l’an dernier une activité BtoB, Bic Blade Tech, dans le domaine des lames de rasoir, qui permet à nos partenaires-clients de bénéficier de notre technologie et expertise industrielle. Cette activité nouvelle devrait générer 15 à 20 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année. A moyen terme, elle pourrait atteindre 25% à 30% du chiffre d’affaires de Blade Excellence [activité Rasoirs], avec des marges supérieures à la moyenne de cette division. Nos clients sont des marques présentes sur des segments et des zones géographiques où Bic n’opère pas. C’est un moyen de créer plus de valeur pour chaque euro de R&D [recherche et développement] investi.

Justement, quel budget allouez-vous à la R&D ?

Nous investissons en moyenne 2% du chiffre d’affaires par an en recherche et développement depuis plusieurs années. Il y a deux ans, avec la mise en place de notre nouvelle organisation, nous avons mutualisé certaines activités entre nos trois métiers [Papeterie, Briquets, Rasoirs], par exemple dans le domaine de la plasturgie ou de l’assemblage. Le développement durable occupe aussi une part importante de ce budget, un mouvement qui s’est accéléré depuis 2018. Nous avons fixé des objectifs de réduction de plastique dans nos emballages à l’horizon 2025 et dans nos produits à l’horizon 2030. Pour tout nouveau projet de R&D, la question se pose d’abord de savoir si cela réduit notre empreinte environnementale, mais aussi si cela répond à un besoin réel ou à, une demande du consommateur. Car nous sommes passés d’un modèle centré sur notre expertise industrielle à un modèle centré sur les besoins du consommateur. Il suffit parfois d’un petit changement sur un produit pour avoir un gros impact.

Quels sont aujourd’hui les moteurs de croissance de Bic ?

Ils sont d’abord organiques et passent par des investissements industriels qui nous permettent d’adapter nos capacités de production à la demande. La croissance passe aussi par des acquisitions dont nous avons accéléré le rythme puisque nous en avons réalisé trois au cours des deux dernières années : Djeep, une marque de briquets qui nous apporte un positionnement plus haut de gamme, Rocketbook, des carnets digitaux réutilisables avec un excellent rapport qualité/prix, puisqu’ils coûtent moins de 40 euros, et Inkbox, leader du tatouage éphémère. Avec ce dernier, nous créons le marché, ce que nous n’avions pas fait depuis longtemps, et nous allons continuer à développer son offre.

Quels sont vos moyens de lutter contre l’inflation ?

Au premier trimestre, la hausse de l’inflation a pesé à hauteur de 13 millions d’euros sur le résultat d’exploitation ajusté, et nous attendons un impact d’environ 100 millions d’euros sur l’ensemble de l’exercice. Nous compensons cet effet d’abord grâce à l’excellence industrielle. Le fait que nous produisions nous-mêmes 90 % de ce que nous vendons est un réel atout, d’autant que nous le faisons le plus localement possible. Etre local nous permet de nous prémunir contre les variations de change, d’éviter de surpayer le transport des marchandises mais aussi de réduire notre empreinte environnementale. L’éco-design est aussi une solution, car il nous permet d’utiliser de moins en moins de matière sans pour autant rogner sur la qualité. Ajoutons que nous avons des contrats de moyen terme avec nos fournisseurs, ce qui est fondamental. C’est là que l’on voit l’importance d’être une grande marque reconnue, avec un historique de plusieurs années avec ses partenaires. Nous pouvons aussi faire de la substitution de matière et nous travaillons sur les prix et les politiques de promotions.

Rencontrez-vous des problèmes d’approvisionnement ?

Nous n’avons jamais arrêté une usine et nous avons réussi à passer toutes les étapes de la Covid. Nous avons fait un très bon début d’année et avons ce qu’il faut pour la rentrée des classes qui arrive en Europe et aux Etats-Unis.

Le cours de Bic avait connu une très belle phase entre 2008 et 2015. Quels sont aujourd’hui vos moyens pour relancer le titre ?

Nous ne faisons pas de commentaire sur le cours de Bourse, mais vous noterez que l’action Bic fait 15 points de mieux que le marché depuis le début de l’année… Il y a deux ans, nous avons lancé le plan Horizon, et je suis très satisfait de nos résultats et de l’élan sur 2022 et 2023 en termes d’innovation, d’excellence commerciale et industrielle, et de montée en puissance des compétences. Pour le commerce en ligne, nous avions du retard. Nous l’avons rattrapé en gagnant des parts de marché : entre notre plateforme Bic.com, Inkbox et Rocketbook, les ventes en ligne représentent désormais 12% du chiffre d’affaires du groupe. Nous développons des usines 4.0 [qui permettent de gagner en efficacité]. Le développement durable devient concret dans nos opérations et nos produits et auprès des consommateurs. Nous avons accéléré le rythme, avec le lancement de nouveaux produits et notre arrivée sur de nouveaux segments.

Nous atteindrons notre objectif de trajectoire de croissance à moyen terme d’environ 5%, notamment en nous ouvrant à de nouveaux métiers. Bic n’est plus simplement un fabricant de stylos mais un facilitateur d’expression humaine et de créativité au travers de l’écriture, du tatouage, du coloriage et du digital. Nous sommes aussi passés des simples briquets de poche à des produits à valeur ajoutée pour toutes les occasions d’allumer une flamme (décorés, personnalisés, modèle EZ Reach…). Ils représentent aujourd’hui 36 % des ventes de la division Flame For Life, et nous avons un objectif de 50 % en 2025. Les briquets aussi ont pris le virage écologique, avec un test d’économie circulaire mené actuellement en Espagne et le développement d’une machine de désassemblage et de recyclage des briquets Bic. Enfin, nous avons lancé une activité BtoB, Bic Blade Tech, afin de capitaliser sur notre savoir-faire industriel et notre haute technologie dans les rasoirs.

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Les nouveaux métiers que vous évoquez supposent de passer par des acquisitions ?

Pas seulement, nous avons des projets de développement en cours en interne. Bic est une marque forte, connue dans le monde entier, et nous allons continuer à capitaliser dessus. Nous allons aussi développer la marque de tatouages éphémères Inkbox. Nous sommes bien entendu ouverts à des acquisitions, à condition qu’elles entrent dans une stratégie de création de valeur pour nos actionnaires, qu’elles soient complémentaires pour nos marques et en ligne avec notre stratégie Horizon. Nous avons développé une équipe dédiée en interne qui y travaille.

Développez-vous l’actionnariat salarié ?

En octobre 2021, nous avons donné à tous nos collaborateurs qui ne bénéficient pas déjà de stock-options ou d’attribution gratuites d’actions cinq actions Bic. Une mesure qui a été très bien accueillie. C’est une fierté personnelle d’avoir tous nos collaborateurs engagés dans la réussite du plan Horizon. 

LA QUESTION QUI DÉRANGE

Les consommateurs doivent-ils s’attendre à des hausses de prix à la rentrée ?Précisons que Bic ne fixe pas les prix de vente au consommateur, ce sont les distributeurs. Mais nous nous efforçons d’assurer le meilleur rapport qualité/prix, c’est un ancrage fort de notre marque. En France, par exemple, nous estimons qu’il pourrait y avoir une hausse des prix d’environ 3% en moyenne des fournitures pour la rentrée scolaire dans l’ensemble des circuits. Les prix de certains produits phares devraient rester stables dans la grande distribution. Nous faisons tout ce qui est possible pour protéger le pouvoir d’achat. A moyen terme, néanmoins, il faudra aussi s’assurer de protéger nos marges, et nous appliquerons des hausses de prix sur certains produits, dans certaines zones géographiques et sur certains canaux.

Propos recueillis par Muriel Breiman

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