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Ces start-up n'auraient pas été propulsées sans la crise sanitaire

Elles ont lancé des solutions dites « hygiéniques », aident les entreprises à se digitaliser, accompagnent le télétravail… Ces (très) jeunes entreprises ont su surfer avec habilité, en pleine tempête.

De gauche à droite, de haut en bas : le masque Civility, la solution EverFoot pour ouvrir une porte, le badge Zozio.
De gauche à droite, de haut en bas : le masque Civility, la solution EverFoot pour ouvrir une porte, le badge Zozio. (Civility, EverFoot, Zozio)
Publié le 26 nov. 2020 à 07:00

Ouvrir une porte avec ses pieds, qui aurait pu imaginer un tel business il y a encore quelques mois ? De la crise sanitaire naissent des idées, de nouvelles opportunités que certains entrepreneurs ont su saisir. C'est le cas de Martin Hacpille, qui a fondé Everfoot en plein premier confinement. « On n'arrêtait pas de faire des allers-retours et de toucher les poignées au bureau. Nous en avions marre de nous asperger les mains de gel hydroalcoolique ». Nous, c'est l'équipe d'EverEver, une société spécialisée dans l'ingénierie mécanique, lancée quelques mois avant la crise sanitaire. Ensemble, au bureau, ils ont imaginé un dispositif « hygiénique », une sorte de pédale à clipser en bas d'une porte, qui vient d'être commercialisé. A ce jour, une centaine a été vendue, en particulier à des cabinets médicaux ou des bureaux de grands comptes.

Même émulation chez Pierre Blondon, le fondateur de Civility, une start-up de masques esthétiques, personnalisables et adaptés aux visages de chacun. Pour le serial entrepreneur, dont les autres sociétés sont à l'arrêt, fonder Civility a été une question de survie. L'entrepreneur s'est entouré d'une quinzaine de designers mondiaux pour réaliser son oeuvre. Et il faut dire que la mayonnaise a rapidement pris : 20.000 pièces précommandées et un chiffre d'affaires de 650.000 euros pour cette année. Le tout dans 70 pays, avec une forte activité surtout en France et aux Etats-Unis.

« Un boom, tous azimuts »

D'autres start-up, cette fois créées avant l'ère Covid, ont été propulsées à vitesse grand V avec les confinements. C'est le cas de Skeat, une jeune pousse lancée en 2018, qui propose de commander et d'accéder au menu des bars et restaurants directement sur son téléphone grâce à la technologie flashcode. « On a vécu un boom de la demande, avec des demandes tous azimuts », confie Marc Sarfati, son fondateur. La jeune entreprise a multiplié par cinq sa croissance. Et le reconfinement, avec des restaurants pourtant fermés, n'entame pas l'intérêt des clients et prospects. Tous veulent être fin prêts pour leur réouverture, assure l'entrepreneur.

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« Les grands groupes, les chaînes hôtelières ont compris que c'était le bon moment pour passer au digital. A chaud, ils ont réagi pour des raisons sanitaires, mais sur le long terme, ils voient la valeur que le numérique peut créer pour eux », poursuit l'entrepreneur, qui prévoit de lever un million d'euros début 2021.

Une situation à rebours de la tendance : les start-up sont même cinq fois plus nombreuses (24 % vs 5 %) qu'avant la crise à estimer qu'elles ne croîtront pas cette année, selon la dernière enquête d'EY. Reste que la crise a accéléré des transformations, auxquelles les entrepreneurs doivent être attentifs. « Tout ce qui est lié aux équipements sanitaires permet aux entreprises de rebondir, mais ce n'est pas très structurant. D'autres, en revanche, font des efforts de digitalisation pour des pratiques en pleine explosion », indique Julien Fayet, cofondateur de l'incubateur Schoolab. À savoir : les nouveaux usages du travail (flex office, coworking, télétravail), la transition digitale de la restauration, l'enseignement à distance, etc.

La jeune pousse IdeAll, lancée l'année dernière sur le créneau de événementiel à destination des entreprises, propose désormais des ateliers de team building virtuels, sous la forme de jeux ou d'apéros, pour renouer les liens entre les salariés isolés par le télétravail. De son côté TestWe, spécialisée dans les examens à distance, présente sur le marché depuis plusieurs années , se révèle plus que jamais utile pour les universités.

« Explorer de nouvelles routes »

Pour Martin Hacpille d'Everfoot, la stratégie du sans contact, bien que conjoncturelle, a de beaux jours devant elle : « Toutes les solutions développées dans la lutte contre le coronavirus seront encore vraies pour les épidémies plus usuelles comme la grippe, l'angine, la gastro-entérite… », espère cet ingénieur, dont la petite société gère une équipe de cinq personnes. Un constat partagé par le fondateur de Civility. « Le masque est un objet désormais ancré dans nos habitudes. On va devoir le garder un moment, que ce soit dans notre vie quotidienne ou bien en voyage, glisse-t-il. Et même au printemps, les personnes allergiques seront contentes d'en porter un contre les floraisons. »

Plusieurs jeunes pousses ont ainsi modifié temporairement ou définitivement leur activité face à la crise sanitaire. « On dit toujours qu'il faut « rester focus » quand on lance une boîte. Mais avec la crise, nous avons bien décidé d'explorer de nouvelles routes », témoigne Bastien Triclot, le cofondateur de Zozio. A l'origine, cette start-up s'attaque à la logistique des industriels pour faciliter le déplacement des marchandises grâce à des badges géolocalisés.

Depuis, le badge « KYD, Keep Your Distance » est né pour tracer les salariés dans les usines. Dès qu'ils s'approchent trop près les uns des autres, l'objet bipe. Ensuite, les données (anonymisées) peuvent être remontées pour faciliter l'organisation de l'espace. A date, 25.000 unités ont été vendues en France et dans une vingtaine de pays. Ces nouveaux badges représentent désormais 66 % des revenus de la société, avec des clients comme Renault, L'Oréal, Safran et Saint Gobain. « Ce système est encore plus performant, et les innovations réalisées dans ce cadre ont bénéficié au dispositif de départ. On a fait un bond dans notre développement technologique grâce à la distanciation sociale. Nous avons ainsi gagné plusieurs années », poursuit, enthousiaste, l'entrepreneur qui s'apprête à annoncer une levée pour début 2021.

Camille Wong

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