Comment des villages de l'Aveyron créent des stations-service viables
Dans ce département rural et étendu, les stations-service sont de plus en plus espacées en dehors des villes. Pour y remédier, une dizaine de communes ont choisi de municipaliser la distribution de carburants.
Des maires de l'Aveyron ont décidé que le déclin des stations-service n'était pas une fatalité. Une dizaine de communes de ce département très étendu ont fini par monter leurs propres pompes. Le village de Coupiac, dans la communauté de communes du Saint-Affricain, serait le premier de France à avoir municipalisé une station-service en 1989, quand le pompiste est parti à la retraite.
La gestion en régie imposant des contraintes administratives comme l'obligation de lancer un appel d'offres pour acheter le carburant, la municipalité a confié l'exploitation à une association en 1995.
L'ancien maire, Jean-Marie Sirgues, avait municipalisé la station pour garder le centre de tri postal. Trente ans plus tard, la station est toujours là alors que la population a chuté de 650 à 400 habitants. « Nous avons développé la demande en baissant le prix du carburant pour éviter que les gens fassent le plein et les courses ailleurs, explique Yves Roussel, ancien employé municipal à la retraite et trésorier bénévole de l'association Coupiac service distribution. Le maintien de la station-service a permis de garder l'épicerie, la maison de santé, le café-restaurant, etc. »
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C'est un libre-service avec deux pompes à gazole et à essence. « Nous avons un projet de pompe à bioéthanol mais nous devons d'abord investir 20.000 euros pour changer le terminal de paiement selon la réglementation », précise Yves Roussel. La seule station-service à 20 kilomètres à la ronde vend les carburants seulement 6 centimes plus chers que les grandes surfaces. Pour y parvenir, l'association fait peu de bénéfices et n'emploie pas de personnel, mais paie les interventions des agents municipaux.
Economie alternative
Les achats de carburant sont groupés avec la station-service privée de Saint-Sernin-sur-Rance pour baisser le coût. Les habitants et une cinquantaine d'entreprises s'y approvisionnent, portant le chiffre d'affaires à 450.000 euros par an. « C'est une économie alternative car une station privée ne serait pas rentable », affirme Yves Roussel.
Ségur (Aveyron), village de 550 habitants sur le plateau du Lévézou, a ouvert lui aussi sa station-service communale au début des années 1990 pour pallier l'absence de carburant. La mairie a installé un automate à carte avec deux pompes à gazole et à essence, puis deux bornes de recharge électrique il y a trois ans. Située sur la D29 très fréquentée entre Rodez et Millau, la station dessert aussi les automobilistes de passage, ce qui lui vaut d'acheter une semi-remorque de carburant de 36.000 litres chaque semaine et le double en été.
Nous ne faisons que 10.000 euros de bénéfices par an et la station ne serait pas rentable avec un employé.
gilles plet Maire de Ségur
« Nous sommes moins chers que les autres stations indépendantes car nous ne prenons qu'une marge de 5 à 6 centimes par litre, affirme le maire de Ségur, Gilles Plet. Nous ne faisons que 10.000 euros de bénéfices par an et la station ne serait pas rentable avec un employé. » D'autres villages ont ouvert des stations communales avec l'aide des collectivités comme Arvieu, Le Truel ou encore Saint-Cyprien-sur-Dourdou car, selon le maire « il y a beaucoup d'espace entre les stations dans l'Aveyron ».
Laurent Marcaillou (Correspondant à Toulouse)