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Comment Deutsche Bank est devenue la banque de Trump

Depuis la fin des années 1990, la banque allemande a financé certains des projets les plus emblématiques de Trump. Les élus démocrates du Congrès s'apprêtent à enquêter sur ces liens. 

La tour Trump (à droite) en face des Nations Unies, dont les diplomates de l'organisation tentèrent en vain d'empêcher la construction 
La tour Trump (à droite) en face des Nations Unies, dont les diplomates de l'organisation tentèrent en vain d'empêcher la construction (Mark Lennihan/AP/SIPA)

Par Elsa Conesa

Publié le 24 mars 2019 à 09:46

Des actifs surévalués, une solvabilité discutable, des signaux d'alarmes ignorés... Outre-Atlantique, les relations tumultueuses entre Donald Trump et Deutsche Bank, qui l'a financé quasiment sans discontinuer depuis la fin des années 1990, intéressent particulièrement les élus du Congrès.

Deux commissions parlementaires de la Chambre des représentants, désormais contrôlée par les démocrates, comptent enquêter sur la proximité de l'établissement avec l'actuel président américain, espérant avoir ainsi une vision plus claire de sa situation financière. Un examen dont la banque allemande, déjà dans le viseur du régulateur aux Etats-Unis, se serait bien passée, alors qu'elle travaille à son rapprochement avec Commerzbank. 

Boycotté par Wall Street

Plusieurs enquêtes récemment parues dans la presse américaine ont souligné l'étroitesse et l'ancienneté des liens entre l'ex-homme d'affaires et la banque. En 20 ans, Deutsche Bank a ainsi financé certains des projets les plus emblématiques de Trump, depuis la tour élevée en face des Nations Unies à New York jusqu'à son grand hôtel à Washington, inauguré en 2016. Au total, elle a prêté au moins 2,5 milliards de dollars à son organisation, lui permettant de protéger sa réputation d'homme d'affaires à succès quand le reste de la place financière le boudait. 

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Pourtant, Donald Trump n'avait jamais eu un profil d'emprunteur conventionnel. A la fin des années 1990, il avait plusieurs fois fait faillite et était black-listé par les grandes maisons new-yorkaises, auprès de qui ses impayés s'élevaient à 3,4 milliards de dollars . Mais Deutsche Bank était décidée à implanter sa marque à Wall Street, un marché ultra-concurrentiel, en misant sur l'immobilier et sur une clientèle plus risquée et donc moins courtisée par ses concurrents. 

Trump n'a pas été un client plus exemplaire avec Deutsche Bank qu'avec ses concurrents, et à plusieurs reprises, certains des responsables de l'établissement ont tenté de couper les ponts. En 2003, les équipes chargées des placements obligataires ont ainsi décidé de ne plus faire affaire avec lui après qu'il eut fait défaut sur des titres qu'elles avaient placés sur le marché. Deux ans plus tard, une autre division de la banque accepte pourtant de financer un projet de tour de 92 étages à Chicago en ignorant les mises en garde des analystes internes: son patrimoine, qu'il chiffrait à 3 milliards, ne valait d'après eux que 788 millions de dollars. Mais la banque décide de passer outre.

Risque de réputation

Lorsque la crise de 2008 menace le développement de ce projet, Trump, dans l'incapacité d'honorer sa dette, attaque Deutsche Bank en justice, arguant de la responsabilité de l'établissement dans la crise. Celle-ci décide alors de rompre les liens. Mais trois ans plus tard, le voilà qui sollicite un nouveau financement, cette fois auprès des équipes de gestion de fortune, proches de son gendre Jared Kushner. Malgré les réserves d'Anshu Jain, qui dirige alors la division de banque d'investissement, Deutsche Bank accepte, une nouvelle fois, de le financer.

Ce n'est que lorsque Trump se lance dans la course à la Maison blanche et multiplie les provocations que la banque mesure les risques auxquels il l'expose. A quelques mois du scrutin de 2016, le comité chargé des risques de réputation décide de prendre ses distances et refuse de lui accorder le nouveau prêt qu'il demande pour financer un golf en Floride et un autre en Ecosse. Les responsables de la banque redoutent que les fonds ne puissent servir à financer sa campagne, et craignent de devoir gérer un défaut du candidat. La banque cherche depuis à minimiser le poids de cette relation. Elle aurait même demandé à ses équipes de ne plus prononcer le nom de « Trump » à l'extérieur . Interrogée, la banque a précisé qu'elle s'engageait «à coopérer aux enquêtes en cours ». 

Elsa Conesa (Bureau de New York)

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