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Portrait

Yves Delmas, postier dans l'âme

Depuis mai, Yves Delmas est le CEO de GeoPost-DPDgroup, à la tête des 120.000 personnes de ce spécialiste du colis, filiale de La Poste. Son objectif ? Faire passer le chiffre d'affaires de 14,7 à 25 milliards d'euros... entre deux livres sur le rock'n'roll.

Yves Delmas
Yves Delmas (Patrice Maurein)

Par Laurance N'Kaoua

Publié le 28 juin 2022 à 17:48Mis à jour le 29 juin 2022 à 11:46

Rendez-vous est pris à la librairie Le Divan, temple de la littérature parisienne. Entre deux avions et trois réunions d'affaires gravées dans son emploi du temps de patron. Car, depuis mai, Yves Delmas est le CEO de GeoPost-DPDgroup et brasse, à la tête des 120.000 personnes de ce spécialiste du colis, filiale de La Poste, 14,7 milliards d'euros de chiffre d'affaires.

Mais s'il est un postier dans l'âme, ce dirigeant, passé par Sciences Po et bardé de diplômes, notamment en histoire et en droit, n'est pas moins à l'aise au milieu des 60.000 ouvrages en vente dans la boutique.

BeatleStones

Et c'est dans cette librairie, désormais rue de la Convention, qu'Yves Delmas aurait dû dédicacer, en plein confinement, son dernier livre « BeatleStones » : un traité, truffé d'anecdotes que ce fan de rock a coécrit sur le duel entre les Beatles et les Rolling Stones. L'ouvrage, que son complice Charles Gancel et lui-même ont mis dix ans à rédiger, a, d'ailleurs, raflé le prix des Postiers écrivains 2021. « Choisir Le Divan avait, pour moi, un parfum de revanche », glisse, avec un léger accent de son Albi natal, ce dirigeant né, comme les Rolling Stones et le premier single des Beatles, en 1962.

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Il parle français, anglais ou espagnol d'une voix feutrée. Et porte, sur le rock ou le royaume des affaires, un regard aiguisé. Ainsi, il souligne les désordres d'une chaîne d'approvisionnement mondiale, qui chancelle au gré des confinements saccadés de la Chine, des ravages de la guerre en Ukraine ou de l'inflation qui rôde. « Le manque de visibilité s'installe. Et le champ des certitudes vacille. Bientôt, les grands e-marchands risquent d'être à court de biens. Déjà, le marché du jouet subit certains retards », commente Yves Delmas, dont l'une des décisions fut de retirer son groupe de Russie.

25 milliards en 2025

« Parti de rien » en 1999, GeoPost est désormais numéro un du colis en Europe, avec des marques comme Chronopost, DPD, SEUR ou BRT. Le groupe, qui livre, chaque jour, 8,4 millions de paquets dans le monde, s'étire dans 50 pays à force de rachats qu'Yves Delmas a orchestrés, de Dubaï au Brésil, en passant par l'Asie du Sud-Est. Objectif ? Porter le chiffre d'affaires à 25 milliards d'euros d'ici à 2025.

« C'est un grand logisticien. Il connaît les métiers du colis par coeur », estime Philippe Wahl, le PDG du groupe La Poste. Et pour cause ! Lorsque ce fils d'un médecin ORL et d'une professeure d'allemand a rejoint la galaxie postale, La Poste, loin d'être une entreprise, était encore un pan de ministère. Elle a happé Yves Delmas dès sa sortie de la prestigieuse Ecole nationale supérieure des PTT. D'ailleurs, l'étudiant avait monté un groupe de rock, baptisé « Service Publik ». Un signe.

Jusque derrière le rideau de fer

A l'époque pourtant, ce fan de rugby et de foot (qui joue dans une équipe à Madrid où il réside avec femme et enfants) se voyait plutôt journaliste sportif. Mais dès 1988, il s'est vu propulser chef du bureau Europe et Asie à la direction des affaires internationales de La Poste, arpentant le monde jusque derrière le rideau de fer. Avant d'être envoyé comme directeur général adjoint chez TNT, dont La Poste était actionnaire, puis de gravir les échelons. Ainsi, il a pris la direction de filiales, dont SEUR en Espagne. En 2016, il est devenu le patron Europe de GeoPost, reprenant les rênes du groupe après le décès brutal de l'ancien CEO Boris Winkelmann. « Il est fidèle, authentique. La Poste est pour lui l'engagement professionnel d'une vie », déclare Philippe Wahl, qui évoque aussi « son esprit entrepreneurial et non-conformiste ».

Les animaux du rock

On le dit « bienveillant », « modeste » et d'une prudence de Sioux. « Au XVIIIe siècle, on aurait parlé d'un honnête homme », résume son ami Charles Gancel, fondateur d'ICM Associates, qui loue sa puissance de travail, sa mémoire et « ses capacités relationnelles même s'il n'aime pas perdre ! » Yves Delmas est plus sévère, se dit « assez piteux » à la guitare, assure « beaucoup devoir aux équipes ».

A l'ère où le numérique bouscule ses métiers, il fourbit ses armes. Certes, le covid a donné à l'e-commerce un essor durable. Mais déjà, au fil des ans, la nature des biens transportés a changé : fini les livraisons de cartes de téléphone, de CD ou de magnétoscopes. « Je suis persuadé qu'à l'avenir, il y a des objets que nous ne transporterons plus, comme les lunettes de vue ou les clés, appelées à évoluer avec la chirurgie ou la technologie », dit-il. En attendant, ce fan de Bob Dylan et de polars oeuvre déjà avec Charles Gancel à un troisième livre, cette fois, sur les animaux dans le rock…

Laurance N'Kaoua

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