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Fashion week homme, le vrai retour

Une ambiance de fête a soufflé ces derniers jours sur la planète mode, tout au plaisir des retrouvailles autour des collections printemps-été 2023. Couleur, fraîcheur, créativité ont dominé une semaine qui a prouvé que rien ne peut remplacer l'expérience des défilés physiques.

Loewe, collection homme printemps-été 2023.
Loewe, collection homme printemps-été 2023. (© Molly Lowe)

Par Astrid Faguer, Frédéric Martin-Bernard

Publié le 28 juin 2022 à 17:20Mis à jour le 1 juil. 2022 à 01:11

Traditionnellement, les défilés homme du mois de juin sont un moment joyeux pour les gens de la mode. Les enjeux, le public, la météo clémente et l'ouverture des terrasses aidant, tout est plus léger que lors des précédentes et sérieuses fashion weeks femme. En dépit de l'émergence d'un énième variant du Covid-19, les shows des collections masculines printemps-été 2023 n'ont pas dérogé à cette règle. Sur les podiums et dans le public, l'ambiance était à la couleur, à la fraîcheur et à la fête. Comme s'il avait été décidé tacitement et collectivement d'ôter la chape qui pèse sur le monde de la mode - et le monde tout court - depuis des mois.

A Paris comme à Florence et à Milan, les acheteurs internationaux étaient de retour, attestant de la vitalité du secteur et d'une réalité indéniable : le digital ne peut se substituer totalement au physique. Si la pandémie a activé de nouveaux usages, rien ne semble remplacer l'expérience d'une fashion week. Sous le soleil - parfois de plomb -, les défilés ont donc réuni journalistes, célébrités, influenceurs, acheteurs du monde entier, et parfois le grand public fut même invité à la fête, comme chez AMI et Marine Serre.

Dolce & Gabbana.

Dolce & Gabbana.© Dolce & Gabbana

Les shows des grandes maisons ont plus que jamais attiré des centaines de badauds qui, postés à l'entrée, prennent en photo les têtes connues et les tenues les plus « stylées » pour les mettre en ligne dans l'instant. C'est à celui qui publiera le premier. Mention spéciale à Celine qui comptait parmi ses invités Lisa, star d'un groupe de K-pop aujourd'hui rappeuse solo. Jamais de mémoire de fashion week n'avait-on vu de tels débordements d'amour - et de foule - à l'entrée d'un défilé.

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Paul Smith.

Paul Smith.© Paul Smith

Moins dystopiques que les précédentes saisons, les collections ont fait la subtile synthèse de tendances dans l'air du temps : l'influence de la nature, le tailoring inspiré des volumes streetwear et des années 1990, les couleurs acidulées et les transparences sexy. La fluidité des genres est aujourd'hui un non sujet, totalement soluble dans les propositions créatives. Elle s'est banalisée avec une rapidité propre à la mode qui confirme combien cette industrie reste un puissant laboratoire sociétal.

B. D.

Celine.

Celine.© Celine

La mode printemps-été 2023 décryptée par les acheteurs

Partout, le sourire aux lèvres dans les rangs des shows, et peut-être même un peu plus du côté des acheteurs professionnels qui doivent passer leurs commandes à l'issue des défilés. « C'est génial d'être de retour à Paris en personne, de sentir et de toucher les produits, de se reconnecter à celles et ceux qui font la mode, qui dessinent les collections, les vendent, les photographient ou les commentent. Il y a tout un pan de nos métiers qui ne passe pas sur Zoom. Ce contact direct avec la profession nous a vraiment manqué », explique Sam Kershaw, directeur des achats du site britannique Mr Porter, dont la dernière fashion week à Paris remontait à janvier 2020.

« C'est excessivement difficile d'acheter sans toucher ni détailler une collection que tu devras ensuite promouvoir et vendre dans ta boutique, ajoute son collègue Daniel Todd. Avec le recul, on s'aperçoit qu'on a eu tendance à se rabattre sur des marques que l'on connaissait déjà. Ce retour à Paris est l'occasion de découvrir tous les nouveaux noms apparus depuis deux ans. Et ils sont bien plus nombreux que l'on pourrait penser. »

Givenchy.

Givenchy.© Adam Katz Sinding

Bruce Pask, le directeur de la mode masculine du grand magasin new-yorkais Bergdorf Goodman, seul acheteur nord-américain à avoir fait le voyage en juillet 2021, relève que « les deux dernières années ont bousculé les rapports entre les marques et les magasins qui les revendent. Il est aujourd'hui important de consolider ces relations via des rendez-vous physiques et, par ailleurs, de dénicher sur le terrain des jeunes talents qui inciteront le consommateur à renouveler son dressing. » Plusieurs nouveaux showrooms réunissant des marques indépendantes sont d'ailleurs apparus lors de cette fashion week de reprise, et deux fois plus d'acheteurs qu'en janvier 2022 ont fait le déplacement dans la capitale parisienne, selon la Fédération de la haute couture et de la mode.

« C'est lorsqu'on rencontre en personne les équipes créatives et commerciales des marques que naissent les projets de collaboration ou d'édition spéciale », ajoute Chris Kyvetos du site allemand mytheresa.com qui développe une section masculine depuis deux ans. « Nous sommes revenus en force, complète Brigitte Chartrand, vice-présidente womenswear du site avant-gardiste ssense.com, qui pioche beaucoup dans les marques de mode masculine pour sa section féminine. C'est génial d'être de retour à Paris, de voir les collections en vrai, de prendre part à une fashion week si riche et si animée. »

F. M.-B.

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Louis Vuitton.

Louis Vuitton.© Louis Vuitton

Les tendances

Il y a de la joie, de la créativité dans l'air. Mises en scène festives, défilés en extérieur auxquels est invité le grand public, collections qui font référence à la jeunesse, voire à l'enfance… chez Louis Vuitton, Prada, JW Anderson, Loewe, Givenchy, AMI, Hermès, Amiri, Officine Générale, Marine Serre, Kenzo, Craig Green, KidSuper, Casablanca… « L'état d'esprit général est très positif. Les professionnels sont heureux de se retrouver, les collections sont jolies, créatives… En plus, c'est une session d'été, saison où les propositions sont toujours plus légères, lumineuses », observe Daniel Todd, du site britannique Mr Porter. « C'est une saison riche en jeunes designers prometteurs, en collections qui sont sorties grandies de la pandémie », ajoute Bruce Pask, de Bergdorf Goodman. « Je pense à la fois à Officine Générale, qui fête ses dix ans, sort de sa zone de confort et reste très portable et, dans un tout autre registre, à Craig Green, qui atteint une forme d'aboutissement. »

Dior Homme. 

Dior Homme. © Morgan O'Donovan

Les variations du costume. D'un côté, des coupes oversized, extra-larges, influencées par le streetwear ou les années 1990. De l'autre, des volumes ajustés, taillés au cordeau. Dolce & Gabbana, Celine, Prada, Giorgio Armani, Versace, Dior, Lemaire, Dries Van Noten, Ermenegildo Zegna, Issey Miyake Men, Louis Vuitton, Comme des Garçons… « Il y a un retour incontestable du tailoring. Dans certaines collections, on perçoit une nostalgie pour le costume traditionnel qui n'a pas été beaucoup porté depuis deux années. Ailleurs, il est réinterprété de façon moderne, en jouant sur les proportions, les longueurs », décrypte Olie Arnold, directeur du style de Mr Porter. « Les variations autour du costume, que nous appelons le 'nouveau formel', font définitivement partie de nos achats pour le printemps prochain, ajoute Chris Kyvetos chez mytheresa.com. Nous voulons offrir plusieurs options à nos clients : des griffes établies aux labels contemporains qui proposent des porter différents. Nous ne sommes surtout pas focalisés sur une seule silhouette. »

Fendi. 

Fendi. © Fendi

Le denim, plusieurs possibilités. La toile de jean fait son grand retour en force dans des versions délavées, élimées, effilochées, voire trouées… chez Fendi, Dolce & Gabbana, Celine, Prada, Etudes Studio, Y/Project, Amiri… « Il y a l'idée d'un retour à la liberté dans de nombreuses collections. On y associe souvent la conquête de grands espaces, de nouveaux territoires et, par extension, le denim qui faisait partie de la panoplie de ces aventuriers », observe Daniel Todd. « Ce tissu mythique est omniprésent, ajoute Bruce Pask. Il est décliné dans tous les aspects et, à mon sens, encore plus intéressant sur le plan mode, il est utilisé pour des pièces qui ne sont pas des pantalons à cinq poches, qui amènent à de nouvelles silhouettes. »

Le culte du corps. Des vêtements échancrés, morcelés, évidés qui laissent voir les muscles. Egalement des tissus aériens, des étoffes ajourées et des dentelles. Celine, Givenchy, Loewe, Dior, Versace, Etro, Egonlab, Dries Van Noten, JW Anderson, Craig Green, Marine Serre, Rick Owens, 1017 Alyx 9SM... « Ce sont des pièces très visuelles, qui accrochent l'oeil et se vendent particulièrement bien en e-commerce, explique Brigitte Chartrand. Après, rien n'oblige à les porter comme sur les podiums. Ce sont des vêtements qui se prêtent aux superpositions. »

Un dressing éclectique. Le long et le court, le trench et le bermuda… Les collections sont plus riches en thèmes, en modèles. Elles habillent les hommes de la sortie de l'hiver au plein été. Louis Vuitton, Dior, Hermès, Loewe, Paul Smith, Dries Van Noten, Lemaire, Marine Serre, Hed Mayner… « C'est une saison très éclectique, confirme Bruce Pask. Il y a tout un travail sur les proportions, les volumes, les longueurs qui est à la fois flagrant chez des designers établis comme Dries Van Noten et des plus jeunes comme Hed Mayner. Cette grande diversité est également flagrante dans les couleurs. C'est une saison belle à voir en vrai. Nous sommes très heureux d'être là. »

F. M.-B.

La chanteuse Liv Del Estal. 

La chanteuse Liv Del Estal. © DR

Mode et musique, les liaisons heureuses

L'IFM (Institut français de la mode) et Universal Music France se sont associés pour faire travailler ensemble leurs jeunes talents respectifs. Pendant six semaines, seize étudiants en master direction artistique de l'école de mode ont travaillé avec quatre chanteurs en développement - Carla de Coignac, Liv del Estal, Pongo, Simia. Ensemble, ils ont imaginé des clips où infuse l'univers de chacun des artistes impliqués. Les vidéos, dévoilées quelques jours avant le début de la fashion week, font une nouvelle fois la démonstration que le dialogue créatif entre ces deux industries est toujours fécond.

A. F.

Béline Dolat, Frédéric Martin-Bernard et Astrid Faguer

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