L’agence de presse turque Anadolu a annoncé, le 27 janvier dernier, une nouvelle découverte archéologique qui compte déjà parmi les plus spectaculaires de ce début d’année. Robert Rockiki, diplomate polonais travaillant à l’ambassade d’Ankara, est en effet tombé par hasard, lors d’une randonnée, sur les vestiges de la cité perdue de Thebasa, au sud de l’Anatolie centrale, en Turquie. Occupée par les Romains puis par les Byzantins au début du IXe siècle, cette ville fortifiée vieille de onze siècles était recherchée par les archéologues depuis 200 ans.
La cité mystère
Robert Rockiki était parti en randonnée en Anatolie, sur la piste de l’histoire de l’Asie Mineure, selon la pratique du traçage historique ou histracking. « La Turquie est la meilleure destination au monde pour ce type d’activité, car c’est un pays riche en monuments historiques et en merveilles naturelles », explique le chanceux diplomate. Au carrefour des civilisations grecque, romaine et ottomane, l’Anatolie est une région à l’histoire culturelle particulièrement riche et dans ses sols gisent encore de nombreux trésors archéologiques qui attendent d’être découverts. L’exploratrice américaine Gertrud Bell (1868-1927), célèbre aventurière et archéologue britannique spécialiste du Proche-Orient ancien, avait déjà cherché, en vain, les ruines la ville antique de Thebasa, considérée comme l’une des cités les plus importantes de l’ancienne province de Lycaonie. L’académicien autrichien Gertrud Laminger-Pascher s’y est également longuement intéressé, publiant les résultats de ses recherches sur le sujet en 1991.
Comprendre l’histoire de l’Anatolie
Peu d’informations nous sont parvenues permettant de déterminer l’emplacement de cette ville perdue, hormis des allusions présentes dans les œuvres de Pline l’Ancien (23-79). L’auteur romain la situait dans la région du Taurus, une chaîne de montagnes qui se dresse au sud-est du plateau anatolien et où a été mise au jour il y a quelques mois une citadelle de la civilisation hittite du IIe millénaire avant J.-C. « La ville a souvent été recherchée dans des endroits divers et très éloignés », explique Robert Rockiki. Cette position secrète était finalement son principal atout : éloignée des routes principales, elle se protégeait, en effet, des ennemis potentiels, restant par la même occasion à l’abri des regards d’éventuels témoins qui auraient pu transmettre à la postérité leurs connaissances sur la ville.
Pour Stephen Mitchell, spécialiste de l’Asie mineure, « cette découverte résout une énigme de longue date sur la géographie de l’Asie Mineure. Cela aide à comprendre certains problèmes auparavant insolubles de routes et de voies de communication entre les villes de Konya et Adana ». L’étude de ces vestiges archéologiques devrait également faire avancer la connaissance des historiens sur les conflits entre les Byzantins et les Arabes aux Xe et XIe siècles.