La crise de confiance pousse la devise anglaise au plus bas depuis... 168 ans
Le taux de change global de la livre sterling, qui a chuté de 20 % depuis janvier, témoigne de la grave crise de confiance qu'elle traverse.
La chute de la devise britannique a été généralisée, un témoignage de la crise de confiance qui la frappe. Le taux de change de la livre par rapport aux devises de ses principaux partenaires commerciaux, a chuté de près de 20 % depuis le début de l'année. Les pays de la zone euro pèsent pour 65 % de cet indice, les Etats-Unis 16,5 % et le Japon 7 %. Ce taux de change global est aujourd'hui au plus bas depuis 168 ans, d'après la Banque d'Angleterre.
A 1,1056 euro, la livre sterling s'approche de la parité avec la monnaie unique, un seuil psychologique important qu'elle n'a jamais atteint. Elle avait inscrit son plus bas historique à 1,0205 euro fin 2008. Lors de cette année-là, elle avait enregistré la plus forte baisse des grandes devises par rapport au dollar en chutant de 26,3 %, sans toutefois inquiéter beaucoup la banque d'Angleterre qui voyait dans cette faiblesse un regain de compétitivité à l'exportation et moyen de relancer l'inflation. La livre sterling terminait jeudi en léger repli de 0,2 %, à 1,2190 dollar. Elle a perdu 17 % par rapport au billet vert depuis le début de l'année. La sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne devrait affaiblir la corrélation de la devise britannique avec l'euro, et la rapprocher encore de l'orbite et de la zone d'influence du billet vert. La livre était jusqu'ici perçue par les marchés comme un « dollar européen », un « câble » (transatlantique) entre les deux continents.
Perte de prestige
La livre sterling est-elle en train de sortir provisoirement de la « grande » histoire monétaire ? Sa chute depuis le Brexit, ponctuée d'un récent « krach éclair », évoque plus un déclassement, une perte de statut qu'une simple correction. Certains stratèges comparent même désormais cette devise, née à la fin du XIe siècle, à une monnaie émergente.
Ainsi, avant le Brexit, David Bloom, stratège sur les changes chez HSBC, mettait en garde sur le risque que « la livre sterling intègre le club des "5 fragiles" (real brésilien, livre turque, rand sud-africain, roupies indienne et indonésienne) du fait de l'envolée des déficits (courant et budgétaire) qui suivrait la sortie de l'Europe ». La devise anglaise deviendrait alors une monnaie plus volatile, à la merci des entrées et sorties de capitaux de la part des étrangers et durablement minée par les déficits. En effet quand une devise plonge, son déficit commercial s'accroît dans un premier temps, du fait du renchérissement des importations et avant que le regain de compétitivité à l'exportation ne se fasse sentir dans un second temps.
N. A.-K