Publicité

Pour les femmes ingénieures, les inégalités débutent dès le diplôme

Moins bien payées, avec moins de responsabilités et plus souvent au chômage, les femmes ingénieures - qui ne représentent toujours que 28,5% des diplômés 2016 - sont désavantagées par rapport à leurs homologues masculins.

8738_1498664903_femmes-ingenieures-inegalites-des-le-diplome.jpg
Les écarts démarrent dès le diplôme et ne font que se creuser... (Shutterstock)

Par Clemence Boyer

Publié le 28 juin 2017 à 17:51Mis à jour le 28 juin 2017 à 18:00

Dès la sortie de l’école d’ingénieurs, les jeunes femmes sont payées environ 2.000 € de moins par an que leurs camarades de promotion. C’est l’une des (nombreuses) inégalités que nous avons relevées dans l’enquête de l’observatoire IESF (Ingénieurs et Scientifiques de France) qui se penche pour la 28ème année consécutive sur la situation des ingénieurs tricolores. 

Entre 20 et 24 ans, le salaire médian des jeunes femmes ingénieures est ainsi de 33k€ contre 34,8k€ pour les hommes. Puis, le salaire médian passe à 37,2k€ pour les femmes versus 39,3k€ pour les hommes sur la tranche d’âge supérieure (entre 25 et 29 ans). Chez les 30-34 ans, il y a déjà près de 4.000 € d’écart entre le salaire médian des femmes (45k€) et celui des hommes (48,7k€). Ce qui correspond à une différence de plus de 300 € par mois.

Pour les tranches d’âge supérieures, l’écart ne fait que se creuser… jusqu’à atteindre 17.000 €, avec 83k€ en fin de carrière pour les femmes contre 100k€ pour les hommes. Pire, l’enquête précise “qu’à niveau hiérarchique égal, leurs rémunérations sont inférieures à celles des hommes”.

Publicité

Double peine : plus de chômage et moins de responsabilités

Les inégalités entre les femmes et les hommes ingénieur.e.s ne s’arrêtent pas au salaire. À âge égal, les femmes ingénieures sont aussi un peu plus souvent en recherche d’emploi que les hommes. Chez les moins de 25 ans, le taux de femmes ingénieures à la recherche d’un emploi est supérieur de 3 points à celui des hommes du même âge.

Rappelons tout de même qu’avec un taux de chômage de 3,9% - toutes tranches d’âges confondues - les ingénieurs, hommes comme femmes, ne sont vraiment pas à plaindre sur le marché de l’emploi.

Les ingénieures sont aussi plus souvent dans des situations précaires, puisqu’elles sont deux fois plus en CDD que leurs homologues masculins. Elles accèdent aussi moins souvent à des postes d’encadrement. “Il y a un écart dès l’entrée dans la vie active. Est-ce que ce sont les jeunes femmes qui ne souhaitent pas manager des équipes ou est-ce qu’on ne leur propose pas ?”, s’interroge Marie-Annick Chanel, présidente de l’Observatoire IESF (Ingénieurs et Scientifiques de France).

Si l’écart est assez modeste chez les plus jeunes, ils se creusent ensuite à partir de 35 ans (et de la maternité ?). En tout cas, cette différence au niveau de la prise de responsabilités hiérarchiques est l’un des facteurs explicatifs des différences salariales.

Autre différence notable pour les ingénieures : elles partent moins souvent travailler à l’étranger puisque 12% d’entre elles bossent hors de France, contre 17% pour les hommes.

Féminisation : on stagne !

Si les femmes représentent désormais 28,5% des diplômés pour la promo 2016 (contre 20.8% en 1996 et 4,5% en 1966), cette proportion n’a quasi pas évolué sur les 5 dernières années ! Une situation inquiétante...

Publicité

Certaines filières d’études sont toutefois beaucoup plus paritaires que d’autres, comme l’agronomie/agroalimentaire qui compte 48,5% de femmes parmi la dernière promo. C’est ensuite la chimie avec 36,5% d’ingénieures et la physique avec 24,3% qui forment le trio de tête des spécialités les plus féminisées.

Bonnet d’âne par contre pour la spécialité électrotechnique (10,3% de femmes), mécanique (10,4%) et Sciences & Technologie de l'Information et de la Communication (12,6%).

Certains secteurs sont devenus majoritairement féminins

Côté secteurs d’activité, la situation en matière de parité varie là aussi énormément ! Le secteur de l’eau, de l’assainissement et de la dépollution est celui qui s’est le plus féminisé. Il compte désormais 55% de femmes parmi les salariés de moins de 30 ans contre 13% chez les 45-64 ans. L’industrie agroalimentaire a suivi le même chemin : aujourd’hui, 61% des moins de 30 ans qui y travaillent sont des femmes.

“Les sociétés de services (hors informatique), comme les cabinets d’études ou les sociétés d’ingénierie ont aussi bien progressé, tout comme les industries, à l’exception notable du transport et de l’armement”, note Marie-Annick Chanel.

Si les femmes ne sont pas (encore) majoritaires dans les industries “plastiques, verre” ni dans le BTP, la féminisation de ces secteurs est en tout cas bien enclenchée (elle passe de 8% à 32% pour le premier et de 9% à 27% pour le second). À contre-courant de la tendance générale à l’augmentation de la part des femmes parmi les générations plus jeunes, la banque/assurance est le seul secteur qui voit la proportion de femmes diminuer parmi les nouvelles recrues.

Clémence Boyer

Publicité