Petrobras : pas de démission malgré le scandale
La présidente du géant pétrolier brésilien affirme avoir la confiance de la présidente Dilma Roussef.
Par Anaïs Moutot
« Je reste tant que j’ai la confiance de la présidente Dilma Roussef et qu’elle décide que je dois rester ». Malgré le scandale de corruption qui secoue Petrobras depuis deux mois, la présidente de la compagnie pétrolière publique brésilienne, Graça Foster, ne quitte pas son poste pour le moment.
Précisant avoir proposé sa démission à plusieurs reprises à la présidente du Brésil Dilma Roussef, Graça Foster a assuré que plusieurs candidats « très bien préparés » étaient prêts à prendre la tête du groupe. Il y a une semaine, le procureur général du Brésil, Rodrigo Janot, avait réclamé le renouvellement de la direction, évoquant le « scénario désastreux dans la gestion de la compagnie » qui emploie 80.000 personnes. Mais le ministre brésilien de la Justice, José Eduardo Cardozo, tout en confirmant « qu’il y avait de forts indices de corruption », avait estimé qu’il n’y avait aucune raison objective pour que les actuels directeurs quittent leurs fonctions et encore moins la présidente, Graça Foster.
Le parquet a lancé la semaine dernière les premières poursuites pour corruption, blanchiment et association de malfaiteurs contre 36 personnes, pour la plupart des entrepreneurs, qui sur-facturaient des contrats à Petrobras pour reverser des pots-de-vin à certains de ses directeurs. Deux anciens directeurs de la compagnie font déjà l’objet d’une accusation formelle.
L’entreprise doit aussi faire face à des plaintes d’investisseurs à New-York, qui demandent à être dédommagés des « pertes » subies avec le récent effondrement des titres de plus de 45%. La SEC, gendarme du marché américain, a ouvert une enquête.
Ralentissement des investissements
Pour 2015, Graça Foster a admis que la compagnie contrôlée par l’Etat devra « ralentir certains de ses investissements » afin de voir si elle arrive « à passer l’année 2015 sans captations » de fonds sur le marché. Son plan d’investissement quinquennal était jusqu’ici de l’ordre de 220 milliards de dollars. La compagnie a notamment besoin d’investissements à hauteur de 82 milliards d’ici à 2018 pour exploiter ses gigantesques réserves pré-salifères en eaux très profondes. L’effort pourrait désormais être davantage porté sur la production (qui atteint actuellement 2,1 millions de barils par jour) que sur l’exploration.
Lundi, l’entreprise a repoussé une deuxième fois la diffusion de ses résultats du troisième trimestre et fixé une nouvelle date limite au 31 janvier 2015. Elle assure que ce nouvel ajournement lui permettra de les publier sans risque de voir ses créanciers réclamer un remboursement anticipé de la dette. Après avoir engagé un programme d’expansion ambitieux au cours des dernières années, Petrobras est devenue l’entreprise la plus endettée au monde (120,6 milliards de dollars, un montant qui a tendance à augmenter avec l’appréciation de la monnaie américaine sur le marché des changes).
Près de 4 milliards de dollars blanchis en dix ans
Le scandale de corruption présumée qui secoue Petrobras a éclaté peu avant l’élection présidentielle qui a vu Dilma Roussef être réélue de justesse. L’opération policière « Lava Jato » (Lavage rapide) a mis en évidence un vaste réseau qui aurait blanchi près de 4 milliards de dollars en dix ans.
Jusqu’à présent, l’implication de Dilma Rousseff n’a pas été prouvée, mais cette dernière présidait le conseil d’administration de Petrobras alors qu’elle était ministre de l’Energie sous la présidence de Luiz da Silva. Des hommes politiques de trois partis, dont le Parti des Travailleurs (PT) au pouvoir depuis 12 ans, sont également impliqués dans le scandale, même si aucun d’entre eux n’a encore été inquiété.
Source : AFP et Bloomberg